Commentaires septembre 2020

Depuis mars – soit depuis six mois déjà – Covid nous empêche de nous retrouver physiquement autour d’un conférencier, puis d’un verre : ces échanges nous manquent ! Espérant pouvoir renouer avec cette pratique le plus vite possible, nous avons discuté en bureau de l’opportunité de reprendre les conférences (le 10 septembre dernier). L’automne et l’hiver vont cependant faciliter la circulation du virus et nous avons décidé – à contre cœur – d’attendre encore. Afin de maintenir le contact, nous continuons d’organiser des conférences et de rédiger cette lettre mensuelle. N’hésitez pas à nous dire si vous partagez ou non notre décision et de nous faire part de toute idée pour améliorer nos échanges.

Commentaires N° 8

     Francfort, 30 septembre 2020

Chers membres de la Société Franco-Allemande, Chers amis,

Lors des élections communales de Rhénanie du Nord-Westphalie, le SPD a été devancé de 10 % par la CDU dans ce qui fut naguère son bastion, confirmant la recomposition en cours du paysage politique allemand. Le dernier sondage confirme une CDU en tête (36 %), toujours suivie des Verts (19 %), puis du SPD (17%) et donc seule à même de choisir son allié pour assurer une majorité parlementaire. Pas surprenant donc que la CDU ait récupéré la Mairie de Düsseldorf et que les Verts aient emporté les Mairie de Bonn et d’Aix-la-Chapelle.

Quant à l’Europe, elle s’est toujours affirmée par temps de crise. Celles-ci ne manquant pas, la France et l’Allemagne rapprochent leurs points de vue et sont à la manœuvre pour que l’Europe s’affirme comme LA troisième puissance entre les Etats-Unis et la Chine. Le calendrier politique est idéal : Angela Merkel peut couronner son « règne », en bonne intelligence avec Emmanuel Macron, qui prendra la présidence au début de l’année électorale 2022 : les deux sont condamnés à réussir et ne peuvent y parvenir qu’ensemble.

Le Brexit permet de faire corps pour défendre l’acquis communautaire, les Présidents Erdogan, Putin et Trump nous poussent à repenser la souveraineté européenne. Dans ce contexte, il n’est pas surprenant que Daniel Cohn-Bendit et Claus Leggewie proposent une fédération franco-allemande dans un article très remarqué dans Le Monde du 15 septembre.

Le drame de Moria a conduit France et Allemagne à accueillir 400 mineurs non-accompa-gnés pour les répartir sur une dizaine de pays de l’UE. Sous l’heureuse pression de sa population, l’Allemagne a finalement décidé de montrer l’exemple et de prendre 1500 réfugiés supplémentaires. Il nous faut redéfinir la politique d’asile en prenant acte du refus d’accueil par la majorité des pays européens : tout a un prix… Il s’agit avant tout de combattre les causes de ce drame et d’adopter une politique de coopération avec l’Afrique, de s’entendre sur une politique au Proche-Orient pour endiguer les flux migratoires à venir.

Les rapports avec la Russie s’enveniment encore. Allemagne et France s’indignent de la tentative d’assassinat de Navalny et de la répression en Biélorussie, sans envisager toutefois des sanctions. Renoncer au gazoduc Nordstream II est impossible ne fut-ce qu’à cause des pénalités pour rupture abusive de contrat, mais aussi de la dépendance du gaz russe, bien plus importante pour l’Allemagne que pour les autres États européens : en 2019 elle a importé 55,6 milliards de mètres cubes, la France 14,7 milliards seulement.

Lors de son premier discours sur l’état de l’Union, Ursula von der Leyen a précisé les principes du plan de relance européen et obtenu l’accord du Parlement européen pour lever 750 milliards (ce qui ne fut presque pas relaté par la presse). La France est le 3^ème bénéficiaire avec 37 milliards, après l’Italie (65) et l’Espagne (59 milliards). L’Allemagne est le 5^ème bénéficiaire (23 milliards), recevant autant que la Pologne, de quoi faire réfléchir cette dernière à ce que « vaut l’Europe ». La Commission de Bruxelles veillera à ce que 37 % de cette somme soient consacrés à la lutte contre le réchauffement climatique et 20 % à la digitalisation, sous le regard attentif de l’Allemagne et des quatre pays « économes ». Dans cet esprit, le plan de relance français consacre 30 milliards d’euros à la transition énergétique : 7 milliards pour la rénovation énergétique des bâtiments, près de 5 milliards pour la SNCF (petites lignes, fret, trains de nuit) et 1,2 milliard pour les transports du quotidien (notamment le vélo). 35 milliards servent à renforcer la compétitivité des entreprises et la relocalisation industrielle, y compris 20 milliards de baisse des impôts de production (sur deux ans) et 3 milliards pour renforcer les fonds propres des entreprises (ce qui parait bien peu). Enfin, 20 milliards sont destinés à la formation et à la solidarité:  chômage partiel et plan emploi pour les jeunes (6,5 milliards chacun) , 6 milliards pour les hôpitaux (« Ségur de la santé ») et 5,2 milliards d’aides aux collectivités locales. En même temps, la baisse des impôts des ménages et des entreprises se poursuit : moins 45 milliards depuis 2018.

Quant à la crise du Covid, les cas bondissent de près de 85 % en un mois en France, de moins de 20 % en Allemagne(comme en Italie). Mais comme le dit le virologue et principal conseiller du gouvernement allemand Christian Drosten « La pandémie n’en est qu’à ses débuts. Chez nous aussi ».

Sources : Johns Hopkins Corona Resource Center (31 août & 30 septembre 2020) ; Tests : Statista 30 septembre

Il nous faut donc rester prudents afin de contenir la seconde vague !

Christophe Braouet